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Publié par Tonino D'Arcangelo

Les nouvelles du Pasteur "GAB" 
Les larmes de l'injustice

Il était 18h15, Gabriel et sa collègue raccompagnèrent Mme Blond vers la sortie. Ils traversèrent silencieusement ce long couloir reliant la salle d’entretien à la porte d’entrée du bâtiment. D’apparence, celui-ci peut sembler froid et peu accueillant, plutôt neutre dirait Justine. Allez savoir pourquoi, il se passe régulièrement des choses étranges dans ce corridor. Il ne s’agit pas ici de phénomènes magiques et surnaturels, non ce n’est pas du tout de ça qu’il est question, c’est tout autre chose, des choses très humaines.

L'entretien venait à peine d’être terminé, Gabriel et Justine aperçurent cette riviérette de larmes ruisselant sur les pommettes rosées et relâchées de Madame Blond. Larme après larme l'expression de sa tristesse se frayait un chemin sur ses jolies joues. Ne sachant comment réagir à cet imprévu, les deux collègues se regardèrent et s’échangèrent quelques mimiques indiquant l’un à l’autre l’embarras procuré par la situation. Ils venaient de discuter durant un peu plus d’une heure des difficultés de Benoît.  Parler des entraves de son petit Benoît, réveillait inévitablement ce vieux réflexe qui poussait sans cesse Mme Blond à comparer et à figer les différences qu’elle percevait en lui. Ne pas le voir grandir comme la plupart des enfants de son âge était devenu insupportable à vivre et en même temps, il était amplement nécessaire qu’elle puisse en parler. Au fond, même si elle avait toujours opté pour des tentatives de camouflage, aujourd’hui ça ne lui était plus possible, les murailles de protection et de diversion tombèrent subitement. A la traversée de ce hall d’entrée venait à nouveau s’extérioriser la violence psychologique qu’endurent beaucoup de ces parents. A chaque nouvelle démarche réalisée auprès du monde médico-social, l’annonce d’après coup se réitérait. Une fois de plus, se réaffirmait le handicap de Benoît son fils et des conséquences pour leurs vies à tous les deux. Gabriel et Justine devenaient spectateurs de l’effondrement psychique de cette maman. Cette forteresse intérieure et massive dont seuls les souffrants sont capables de bâtir pour survivre au regard des autres et d’eux-mêmes s’écroulait. Malgré le fait qu’ils aient été formés à la relation d'aide et qu’ils côtoyaient régulièrement la souffrance des parents, rien ne garantissait qu’ils ne puissent, à un moment ou à un autre, faillir dans leur capacité à gérer leurs émotions. Humains et professionnels à la fois, ils restaient des êtres sensibles, leur humanité ne pouvait les protéger entièrement à l’absorbation de la souffrance d’autrui.

- Pensez-vous que Dieu existe, demanda Madame Blond d’une voix étouffée par son accablante peine ? Pensez-vous que j'ai commis une faute pour que mon fils soit handicapé à ce point ? C’était aussi la première fois qu’elle le qualifiait ainsi. Dieu nous aurait-il puni ? Pourquoi nous ? Pourquoi lui ? Mon fils est innocent ! Il ne mérite pas ça ! Et mes voisins qui prétendent que Dieu est bon, pourquoi a-t-il permis ça alors ? Je ne comprends plus rien à cette vie de merde !

Instantanément, sans réfléchir, Gabriel courba les jambes pour s’asseoir sur la chaise bleue située à ses côtés, tandis que sa collègue Justine, très embarrassée, restait debout à faible distance. Tous deux gardaient le silence. Intuitivement, Gabriel ressentit que cette question liant la souffrance à Dieu ne pouvait pas être abordée par un échange purement théologique et philosophique, d’autant plus qu’il n’était pas dans le cadre de son activité pastorale. L’exposition de cette souffrance venait d’être déposée dans un autre cadre. Ici, il n’était pas le « pasteur Gab », il était intervenant psychosocial au même titre que sa collègue. Bien évidemment, la situation n’était pas un obstacle à l’inspiration de l’Esprit. Il se sentit poussé à manifester de la sollicitude envers cette mère écroulée et vidée de ses forces sur lesquelles elle avait si souvent pris appui pour faire face aux réalités de sa vie. Devant elle se dressait deux géants, celui de la culpabilité et celui du handicap. Par définition, le handicap mental, on n’en guérit pas, on grandit et on apprend à vivre avec. Madame Blond était en train de sortir de sa phase de déni. Elle prenait conscience qu’elle se nourrissait depuis quelques temps d’illusions lui donnant l’espoir que la réparation du handicap de son fils serait un jour possible. Pour elle, commençait l'épreuve la plus difficile, la plus éprouvante. On oublie bien trop souvent qu’un dévoilement de la réalité n’apporte pas forcément du bien-être et qu’il peut parfois générer le chaos là où l’illusion apporte un peu d’équilibre à la survie.  Les sanglots et les suffocations captaient l’attention des deux collègues au point où l’absence de mots semblait s’éterniser. Gabriel sentit alors le besoin de s’adresser à cette maman anéantie. Il hésitait fortement car, il mesurait combien la situation était délicate et risquée. Délicate, parce qu'il ne fallait pas se tromper de posture, et risquée car, il ne savait pas comment Madame Blond réagirait à ce qu'il s’apprêtait à lui dire. Avec beaucoup de retenue dans la voix, il s’élança malgré tout :

Vous savez, personne ne mérite ça ! Aucun enfant, aucun parent ! Vous avez posé la question, est-ce que vous croyez que Dieu existe ? En ce qui me concerne, et là je parle en mon nom, Oui ! Est-ce que le handicap de votre fils est la conséquence d'une faute particulière que vous auriez commise, que Dieu vous aurait ainsi puni ? Permettez-moi de vous dire que c’est inconcevable. Dieu ne peut être l'auteur de l’altération cognitive de votre enfant, encore moins par une sanction. Alors, pourquoi a-t-il permis ça ? Malheureusement, je n'ai aucune réponse satisfaisante à vous donner. Mais ce que je sais, ce que j’ai profondément envie de vous dire, c'est que Dieu n'est pas l'auteur de ce malheur, mais qu’il est celui qui peut vous donner toute la force et le secours nécessaires pour traverser cette épreuve inqualifiable et cruelle.

Comment pouvez-vous être aussi sûr de ce que vous dites ? Comment pouvez-vous le savoir ? Pourquoi parlez-vous de Dieu comme si vous le connaissiez ! 

Peut-être parce qu’en dehors de ces murs, je suis aussi pasteur, et qu’un pasteur est sensé connaître un peu les choses de Dieu.

Le flux de ses larmes s'intensifiait. Voyant ce mouchoir en papier rétréci et enserré dans la paume de sa main droite, Justine tendit un paquet dans lequel Madame Blond s'empressa d'en saisir un neuf. Comprenant que la conversation s’entamait de manière très inhabituelle, un peu désemparée, elle quitta délicatement le couloir laissant Gabriel seul avec Mme Blond. C’est alors que subitement, Mme Blond reprit la conversation sous un autre ton :

C'est injuste ! La vie est injuste, vous ne croyez pas ?

Je ne sais pas si c’est la vie qui est injuste ou si c’est la situation que vous vivez qui en donne le sentiment.

C'est bien plus qu'un sentiment vous savez monsieur, c'est une réalité. Benoît ne pourra jamais avoir une vie comme les autres.

Si les propos de Gabriel ne semblaient pas la consoler, ils avaient eu au moins l'efficacité d’arrêter les sanglots et les larmes. Redressant son corps, relevant la tête, elle retrouvait un peu d’énergie. Ce n'était plus sa tristesse qui s'exprimait mais bien sa colère.

 

- De toute façon, tout est injuste, le monde est injuste !

Que voulez-vous dire par tout est injuste ?

Je ne sais pas ! Mais tout est injuste !

Voulez-vous dire que tout le monde n'a pas les mêmes conditions de vie ?

Oui ! Regardez la pauvreté et la discrimination ne font que s’accroître dans le monde. Tous ces migrants qui sont obligés de fuir leur pays pour rester en vie et finalement pourquoi, pour qu’ils finissent noyés dans la mer avec leurs enfants ! Pire encore, quand ils en réchappent, on les laisse crever dans la rue, notre gouvernement ferme les yeux. Regardez les prix ne cessent de grimper pour tout, la vie devient tellement coûteuse que seuls les riches s'en sortent !

Dans son lâcher prise, Madame Blond s'éloignait quelque peu des préoccupations liées à la situation de son fils. Se libérant de son ras-le-bol, elle exprimait pleinement ce sentiment d'injustice qu'elle portait depuis si longtemps avec elle. Gabriel gardait le silence et l'écoutait avec attention tout en devant résister à la tentation de ne pas l'interrompre. Il se sentait à la fois convié à la discussion tout en étant invité à se taire. L’envie de réagir et d’échanger quelques réflexions plus philosophiques le démangeait, mais il avait conscience que ce n'était ni le moment, ni son besoin. Son besoin à elle, était d'être écoutée. Une situation compliquée à gérer pour lui ! Était-ce sa préoccupation professionnelle ? Était-ce son cœur de pasteur ? Était-ce son vécu ? Était-ce son désir et son besoin d'en dire quelque chose qui le mettait à la lisière de cette tension intérieure ? Très certainement que c’était un peu de tout !  Ce qui est sûr, c'est que c’était en tant qu’éprouvé de la vie qu’il se sentait convié à cette tâche à la fois passionnante et délicate. Il savait que débattre sur la notion de justice et d'injustice pouvait s’avérer périlleux car, pour parler d'injustice, il faut d’abord déterminer ce qu’est la justice et ce que signifie être juste. Et puis, il faut identifier de quelle forme de justice on parle : de justice légale, sociale, économique et financière, morale, divine… ? Que signifie chacun de ces concepts ? Son attention portée à Mme Blond eut quelques secondes d’égarement. Pour certains, pensait-il, la justice s'acquiert par une comptabilité égalitaire des droits et des devoirs, des dons et des contre-dons, … pour d'autres, la justice est tout simplement l'application de règles déterminées par avance et sensées dicter ce qui doit être appliqué pour respecter le vivre-ensemble. Pour d'autres encore, il s'agira d'être équitable. Il est vrai qu'il n'y a pas de garantie à être juste en se contentant de donner un nombre égal de parts aux différentes parties concernées. Vous ne mettez pas la même quantité de nourriture dans l'assiette d'un enfant de 6 ans, de 12 ans, d'un adolescent de 15 ans que dans celle d'un adulte. Et pourtant, personne ne pourrait vous reprocher d'être injuste, si ce n'est un esprit qui manque totalement de bon sens. Nous n’offrons pas un nombre égal d'aliments et pourtant nous restons justes par notre équité, ou du moins dans notre intention de l'être. Nous ajustons notre démarche aux besoins singuliers de chacun avec la même préoccupation pour tous, celle d’être nourri selon les besoins nécessaires. Parler de justice et d'injustice ne va pas forcément de soi comme on voudrait nous le faire croire s’exhortait-il, parler de valeurs reste complexe quand leurs significations peuvent vouloir dire tant de choses différentes. En une fraction de seconde, il redevint présent d’esprit auprès de Madame Blond.  Lui apparaissant comme ayant pu déverser suffisamment sa tristesse et sa colère pour pouvoir avancer un peu plus loin dans cet échange, il l’interpella à nouveau :

- Puis-je vous poser une autre question si ce n'est pas indiscret ?

Oui, dit-elle en faisant un petit signe de la tête.

Ce n'est pas une démarche habituelle que je fais dans le cadre de mon boulot, je ne sais d'ailleurs pas si j'en ai le droit, si cela m'est permis. Certains collègues me reprocheraient peut-être de sortir du cadre de ma mission professionnelle, mais je sens que c’est important. Vous m'avez demandé si je croyais en Dieu sans savoir que j'étais profondément croyant. Mais vous, croyez-vous en Dieu ?

Je ne sais pas Monsieur ! Tantôt j'y crois ! Tantôt j'en doute fortement !

Qu'est-ce qui vous fait douter de son existence ?

Toute cette injustice sur la terre.

Pensez-vous vraiment que c'est la faute de Dieu ? Vous ne pensez pas plutôt que ce sont les humains eux-mêmes qui en seraient responsables ?

Moi je pense que si Dieu existe, c'est la faute des deux. Des hommes ? Bien évidemment ! Mais aussi de Dieu puisqu'il a créé l'homme avec le pouvoir de faire le mal. Pourquoi d'ailleurs ?

Dieu a créé avant tout des êtres libres !

Libres de faire du mal ?

Non, surtout libres de choisir, de prendre des décisions ! Je dirais même de prendre la décision.

La décision ? Quelle décision ?

De marcher avec lui ou de gérer la vie terrestre en toute indépendance.

Si c'était vrai, pourquoi avoir laissé le choix quand on constate le résultat ?

Peut-être parce que sans cette liberté de choix, il n'y a pas d'amour. Et tout ce que Dieu fait, est acte d'amour, puisque Dieu est amour.

Comment est-ce qu'un Dieu d'amour a pu accepter de créer un monde avec autant de souffrance et de haine ?

Dieu ne l'a pas créé ainsi, le monde est ce qu'il est devenu et deviendra ce qu'il sera à partir des choix et des décisions humaines.

Oui ok, ça on peut l'entendre pour les guerres, pour les famines, pour la pauvreté, mais pour mon fils Benoît, son handicap mental n’a rien à voir avec les décisions humaines, elles n’ont aucunement influencé sa problématique, sa situation de handicap.

Il est vrai que son problème ne peut pas être relié à la conséquence directe des décisions humaines globales, mais Il n'empêche que nous ne connaissons pas l'explication scientifique de toutes les causes de malheurs.  Nous ne connaissons pas non plus tous les effets impactés par notre gestion de la terre. Il suffit d’entendre parler les climatologues qui aujourd’hui assurent que le comportement humain dans sa gestion du monde participe grandement à certaines conséquences, notamment à l’accélération de certains changements qui conduisent à des catastrophes.

Oui peut être, ça donne à réfléchir sur certains points, mais ça ne rendra jamais mon fils comme les autres.

- Comme les autres, c'est à dire ?

Qu'il soit capable d'apprendre comme les autres et à être heureux !

Vous pensez que Benoît est malheureux ?

Non pas du tout ! Je sais qu'il est heureux, je le vois souvent sourire et aimer ce que je fais avec lui.

Oui et parfois vous le voyez triste et en colère aussi je suppose ?

Oui ça lui arrive aussi.

Comme tout le monde !

Oui comme tout le monde !

Qu'est-ce qui vous semble le plus important, c'est que Benoît ait l'acquisition de certaines compétences comme les autres ou qu'il soit heureux ?

Les deux ! Mais le plus important, c'est quand même qu'il soit heureux, s'écria-t-elle !

Après quelques secondes de silence, madame Blond dit :

 - Finalement ce qui importe je pense, c’est d’essayer de le rendre heureux. C'est vrai, qu’y a-t-il de mieux que de se sentir heureux dans la vie ? C’est juste, non ?

Oui tout à fait ! C'est tout le sens du sacrifice du Christ.

Je n'ai jamais rien compris à ce sacrifice, c'est un mystère pour moi. Pourquoi fallait-il que ce Jésus se sacrifie ?

La compréhension absolue des raisons qui ont poussé Dieu à cette démarche reste un mystère pour nous tous.  Je suis moi-même à peine capable de me donner pour ceux que j’aime, incapable de le faire aussi bien que vous le faites pour Benoît, mais lui, il s'est donné ainsi pour tous les hommes, pas seulement pour ceux de sa famille, pas seulement pour les considérés bons, mais aussi pour ceux qui se sont égarés sur la voie du mal. Tout ça pour que l’humanité puisse retrouver la voie du bonheur. Pour qu’elle reprenne le chemin de la vie.

Quelle injustice ! Encore une injustice ! Un innocent meurt encore pour des coupables.

Quelle justice, j'ai plutôt envie de dire !

Justice ?

Oui je sais, c'est une façon un peu décalée je l'admets, mais moi je vois ce sacrifice comme une possibilité de nous approcher d’une compréhension quelque peu plus affinée de la justice de Dieu.

Ah bon ! Expliquez-moi, c’est bizarre ce que vous me dites !

Lorsque je lis la Bible, je m’aperçois que Dieu s'est toujours adapté aux décisions de l'homme en ajustant sans cesse ses plans dans un but précis : montrer à l'humanité le chemin du salut sans pour autant lui forcer la main. Pour révéler ce chemin, le Christ est venu démontrer l’Amour ultime du Père dans toute sa hauteur, dans toute sa longueur, dans toute sa largeur, mais aussi dans toute sa profondeur. Étant amour, Dieu sait ce qu'est aimer. La véritable justice et la véritable droiture trouvent leur racine dans l'Amour de Dieu.

Si je comprends ce que vous voulez me dire, pour vous, être juste ce serait le fait de s'ajuster aux difficultés d’autrui pour l'aider à prendre la bonne voie pour sa vie ?

Effectivement, c'est une autre manière de dire les choses.

En ce qui concerne Benoît, je ne pense pas que je pourrais un jour accepter son handicap. Je pense que sa vie reste injuste. Mais là où vous avez raison je crois, c’est que la meilleure manière d'aider mon fils, c'est d'ajuster au mieux ce que je fais pour qu'il soit heureux. C'est peut-être ça, lui rendre justice ?

C'est vrai vous avez raison, aimer c’est le bien qui s’ajuste à la vie bonne pour autrui.  Mais vous savez, ce que vous me dites-là, ça nous concerne tous. Cela nous concerne aussi, nous les professionnels qui allons accompagner Benoît. Nous devons sans cesse chercher ensemble à nous ajuster pour son bonheur, ou du moins pour son mieux-être. Et peut-être que c’est l’essentiel pour toute relation humaine finalement.

Gabriel jugea que le temps de clôturer cette prolongation d’entretien était venu.

- Je vous sens un peu mieux que tout à l'heure, non ?

Oui ça va mieux, je vous remercie de m'avoir écoutée !

Oh c’est normal, cela fait partie de mon travail. Toutefois, je vous suis moi-même reconnaissant pour avoir osé vous confier et me partager votre souffrance intime. Cela m'a fait beaucoup réfléchir et m’aide à penser le travail d’accompagnement.

Cette conversation m’a finalement un peu remonté le moral, même si je ne saisis pas toutes vos idées. Il faudrait pouvoir en parler plus longuement. Bon, allez ça va aller, dit-elle en se levant de sa chaise, je suis là pour continuer à aider mon fils afin qu’il soit heureux. En tout cas, ne vous inquiétez pas pour moi monsieur, mais c'était gentil de votre part.

Avant que vous ne repartiez, puisque ce sera peut-être la dernière fois que l'on parle de ça ici, j'aimerais encore vous dire une dernière petite chose. Vous savez, le sacrifice du Christ n'est pas tant le fait de comprendre tout le mystère, mais bien de le recevoir car non seulement il nous aide à trouver une voie de bonheur, mais il ouvre aussi la voie de l'éternité, pensez-y ! Et, si vous voulez en reparler, n'hésitez pas à m’interpeller.  Ça peut s’organiser dans un autre endroit sans souci. Ce serait d'ailleurs avec grand plaisir. Je ne veux pas que vous pensiez que je veux vous forcer la main, surtout sentez-vous libre de le faire ou non, mais n’hésitez surtout pas si vous le souhaitez. Et en ce qui concerne Benoît, nous nous revoyons avec ma collègue Justine dans 15 jours pour son accompagnement. D'ici là prenez bien soin de Benoît, mais ne vous oubliez pas également !

Après cet aurevoir, la porte se referma derrière Madame blond. Gabriel ne savait pas si tout ce qui venait de se passer était ce qu'il fallait dire et faire, mais ce qui était certain, c'est qu’il venait de s'ajuster au mieux de ce qu’il avait pu dans la situation et dans les conditions du moment. Il avait essayé de trouver la bonne mesure. Certainement que certains collègues lui reprocheront d’avoir pris la liberté de dépasser les limites du cadre de son travail. Mais en aucun cas on ne pouvait lui reprocher d’avoir accompli une démarche de propagande religieuse. Non, sa foi lui avait simplement permis de répondre à la question d’une âme en souffrance psychique, certes, mais aussi en souffrance spirituelle ?

Il était 19h40 lorsque Gabriel, entrant dans sa voiture, fût envahi par une joie particulière. Il restait convaincu que cette fin de journée avait été dirigée par le Saint-Esprit ! Dans l’inattendu et l’imprévu, il avait pu semer quelques brides de réponses données par les évangiles à une femme désespérée et accablée par les circonstances de sa vie. Il ferma les yeux et remercia Dieu pour ce moment particulier et rare au cœur de son institution. Mettant sa ceinture, la voiture allumée, il démarra et reparti en direction de chez lui. A peine avait-il pris la route que ses pensées reliaient ce qu’il venait de vivre à deux passages du sermon sur la montagne dans lequel Jésus enseigne l’application de la justice du royaume de Dieu : « Ne condamnez pas les autres, pour ne pas être vous-mêmes condamnés. Car vous serez condamnés vous-mêmes de la manière dont vous aurez condamné et on vous appliquera la mesure dont vous vous serez servis pour mesurer les autres. Faites pour les autres tout ce que vous voudriez qu’ils fassent pour vous, car c’est là tout l’enseignement de la *Loi et des *prophètes. »

Le pasteur Gab n’avait plus besoin de chercher l’inspiration pour ce weekend, il venait de recevoir la direction de son prochain message.

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