Qu'aurions-nous besoin pour vivre des moments heureux et de bonheur ?

Cela fait un bon moment que je travaille progressivement sur un ensemble de réflexions basées sur les 11 premiers chapitres de la bible. Pour ma part, il est de plus en plus certain que ceux-ci sont un fondement, un socle indispensable pour saisir et comprendre la direction des valeurs et principes spirituels que la bible révèle et soutient.

Malheureusement, ils ont très souvent fait "la une" des conflits entre une certaine pensée scientifique et une certaine pensée religieuse légaliste. Lorsqu' ils ne sont pas utilisés à tort et de manière arbitraire ou encore de façon à nourrir certaines propagandes, ces textes sont trop souvent oubliés et mis de côté. Pourtant, ils sont indispensables pour celles et ceux qui cherchent à découvrir, non une vérité scientifique, mais la vérité spirituelle contenant des  valeurs précieuses destinées au soin de notre humanité.

Effectivement, d'un côté la science se limite elle-même par ce qu'elle est, c'est-à-dire une compréhension et une définition de la vie conçue uniquement à partir de ce qu'elle peut voir et objectiver. Elle nourrit la recherche d'une vérité scientifique, rien de plus, rien de moins. Une certaine vérité, certes, mais elle n'est pas LA VÉRITÉ. De l'autre, la pensée légaliste s'interdit toute remise en question de ses interprétations religieuses instituées. Son mécanisme de pensée pousse les esprits à  nier que toute interprétation est une construction humaine, niant par là que celle-ci reste faillible. Elle peut ainsi adopter certaines interprétations et certaines doctrines dénuées de sens en combattant certaines réalités. Son système de pensée peut ainsi décentrer la lettre d'une réflexion de l'esprit. Personnellement, le bras de fer intellectuel entre la science et la religiosité ne m'a jamais emmené très loin dans ma progression spirituelle.

Je vous propose donc, non pas de développer grandement le sujet, il faudrait bien plus qu'un article pour cela, mais d'ouvrir une pensée pouvant contribuer au commencement d'une réponse à la question qui nous occupe ici : " qu'avons-nous besoin pour vivre des moments heureux et de bonheur ? ".

Nous serions tentés, pour beaucoup d'entre-nous qui avons la foi et sommes engagés dans l'église de répondre brièvement : " de Jésus-Christ ". Mais lorsque nous énonçons cela, si en résumé tout est mécaniquement dit, soyons conscient que cette réponse n'a rien d'explicite. Cette réponse est à la fois juste et en même temps maigre pour un enrichissement spirituel. Pourquoi je dis cela ? Tout simplement parce que cette réponse a besoin d'un développement pour en saisir une signification pratique et concrète pour l'esprit humain. Contrairement à ce que peuvent enseigner certains, la foi n'est pas l'opposé de toute raison. Car si la foi était ennemie de la raison, pourquoi lirions-nous la bible et pourquoi nous en inspirerions-nous pour penser la vie ?

Puisqu'il est question d'un commencement de réponse, retournons au premier texte qui parle du commencement des commencements. Lu dans sa langue originale, Genèse chapitre 1 est considéré comme un chef d’œuvre artistique. S'il est question de la création et de son créateur, le style littéraire de ce texte est avant tout poétique. Il y a dans cette poésie un élément fondamental pour saisir la pensée centrale de son auteur. Comme pour l'écriture d'une chanson, il y a dans cette œuvre un refrain qui revient à six reprises. Cinq fois l'auteur dit que Dieu trouva que " c'était bon " et la sixième fois, son appréciation s'amplifie, car il trouva que " c'était très bon ".

Que nous indique ce refrain d'intéressant par rapport à notre question de départ ?

Nous sommes avant la chute, avant la tragédie, nous sommes dans la mise en place du projet initial, de l'objectif divin. Les êtres créés par Dieu ne connaissent encore, ni la souffrance, ni la mort, ni l'angoisse, ni le malheur. Ceux-ci semblent éprouver la vie par un sentiment positif stable et durable. Dans ces conditions de l'Éternité décrite poétiquement dans ce prélude des Saintes Écritures, l'espèce humaine semblait  heureuse et jouissante d'un état de bonheur dans sa plénitude. Un élément retient donc mon attention, c'est ce refrain animé par l'expression " Dieu vit que c'était (très) bon ".

Qu'est-ce que cela me signifie ?

Pour que l'être humain soit heureux, pour qu'il puisse expérimenter le bonheur dans sa plénitude, pour qu'il puisse le vivre éternellement, Dieu lui offrit et lui donna accès à un environnement bon dans de très bonnes conditions ! Mais la suite du chapitre 1 et les chapitres suivants ajoutent autre chose. Cette condition d'accès au bonheur ne dépendait pas uniquement de l'environnement, il dépendait également de la responsabilité de l'espèce humaine. Pour que la création reste très bonne, pour que l'homme garde cette condition de bonheur Éternel, il fallait préserver et entretenir cet environnement, en prendre soin.

En quelque sorte, dans une certaine limite, il semblerait qu'il soit théologiquement juste de penser que l'accès au bonheur Éternel pour nos premiers parents était en partie conditionné par la nature de l'environnement avec laquelle ils évoluaient et que la nature de cet environnement était également  conditionnée en partie par une nature humaine pure et engagée dans sa responsabilité. Il y avait une sorte de réciprocité indispensable, il était "très bon" que l'être humain puisse jouir d'un " environnement bon" qu'il continuerait à le "préserver comme bon".

Vous connaissez la suite de l'histoire, l'entrée du péché va changer les conditions premières, tant dans la nature de l'espèce humaine, que dans l'environnement physique. De plus, les conditions morales, mentales et spirituelles en seront également impactées.

Que m'inspire cette pensée ?

Aujourd'hui, dans mon quotidien, je ne peux vivre la plénitude première connue par l'Homme ADAMIQUE (homme et femme) avant la tragédie, les conditions ne sont plus actuellement réunies. Cependant, par Jésus-Christ, l'accès nous est ouvert afin de pouvoir marcher à nouveau sur la voie qui donnera accès au jardin des délices, lors de la restauration du projet divin.

Alors, de quoi ai-je besoin aujourd'hui pour avoir des moments de bonheur et travailler à celui d'autrui ?

La conviction que j'éprouve en moi au travers de ce texte, c'est que pour vivre des moments heureux et participer à l'accès à un certain bonheur, nous avons à la fois le besoin et la responsabilité d'une " visée de la vie bonne ". Expression ici que j'emprunte au philosophe Français Paul Ricoeur (1913-2005).

Il n'est pas ici question de dicter communément  ce que devrait être un environnement bon pour toutes les situations humaines. Il est plutôt question que chacun, dans sa propre vie et dans ses responsabilités qui lui incombent,  puisse chercher, travailler, s'engager dans la recherche et la construction d'un environnement suffisamment bon pour l'être humain (autrui et soi). Un environnement bon, n'est pas quelque chose qui se standardise, mais quelque chose qui se  construit dans ce que nous éprouvons au moment où nous l'éprouvons. Ce qui aujourd'hui est bon pour vous, ne le sera peut-être plus demain et inversement. Ce qui vous semble nocif et toxique en ce moment pourrait peut-être devenir une bonne chose à l'avenir. Voici quelques exemples personnels. Il y a eu des moments dans ma vie où la présence de certaines personnes me faisait du bien et que la présence de ces mêmes personnes nuisait à ma vie spirituelle quelques années plus tard. Ou encore, il est des livres qu'il m'était impossible de lire il y a quelques années, car ceux-ci me procuraient un certain malaise insupportable, ces mêmes écrits aujourd'hui consolides et font évoluer positivement ma réflexion. Un dernier exemple, certaines formes de travail et d'engagement prises dans ma vie séculière et spirituelle se sont avérées libératrices et édifiantes durant une période et sont devenues destructrices et aliénantes par la suite. 

Ce qui importe, c'est de travailler notre discernement à partir de ce que nous éprouvons en nous en la présence de l'Esprit du Christ. Car la vie en soi, ce n'est pas ce que nous voyons, ça, ce n'est que son incarnation dans le monde visible. La vie, c'est ce que nous éprouvons le plus intimement en nous-même. C'est cette intime vie en nous qui a besoin d'un environnement suffisamment bon pour goûter à ces moments de bonheur. Un environnement se régule, s'entretient et se travaille. Votre "ici et maintenant" n'a pas pour but de rester statique, il y a un devenir à la Vie, à votre vie. Rester souple au mouvement de l'Esprit qui vous aide à fermer et ouvrir au moment opportun les portes qui conduisent aux instants de bonheur.

Dès lors, la vie chrétienne, ici-bas, devient une merveilleuse aventure quand on entre dans une vision de la vie ou l'Esprit du Christ se meut au-dessus de nos défis comme il se mouvait au-dessus des eaux lors de la création. La vie selon la bible, selon les écritures, n'est pas figée, n'est pas statique, elle est en devenir. Il y a toujours un devenir. C'est pour cela que Paul dira  : " Non, mes frères, je n’ai pas du tout l’impression d’être un homme « arrivé », je ne pense pas avoir achevé la conquête et remporté la victoire. Mais je n’ai qu’une préoccupation : oubliant le passé et le chemin parcouru, je tends de tout mon être et de toute mon énergie vers ce qui est devant moi... ". C'est aussi pour cela que lorsque la mort vient, notre temps sur terre s'arrête, mais tout n'est pas fini, c'est pour cela qu'il y a toujours un espoir et un devenir pour la vie quelle que soit l'issue de nos circonstances.

Accordez-vous le droit d'espérer et de vivre des moments heureux. Du mieux que vous le pouvez, bâtissez avec l'Esprit du Christ et participez à l'édification d'un environnement suffisamment bon pour vous donner accès à des temps heureux partagés avec autrui. Vous en avez le droit, cela fait partie du projet initial de Dieu pour l'homme et la femme créés à son image. Car, un être heureux de ce bonheur divin, participe au bonheur d'autrui quand celui-ci ne se refuse pas le droit à un certain bonheur sur terre !

" Celui qui acquiert du sens aime son âme ; celui qui garde l'intelligence trouve le bonheur. "

Proverbes 19.8

" Celui qui réfléchit sur les choses trouve le bonheur, et celui qui se confie en l'Éternel est heureux. "

Proverbes 16.20

 " Attache-toi donc à Dieu, et tu auras la paix ; tu jouiras ainsi du bonheur. "

Job 22.21

Je vous encourage à travailler votre environnement (physique, mental, spirituel, social...) pour qu'il devienne suffisamment bon pour votre vie et celle d'autrui. Un travail minutieux et continu dans ce sens, ne manque jamais de porter du fruit au goût d'un certain bonheur qui annoncent ce que nous vivrons dans la plénitude lors de notre résurrection.

Puissiez-vous être heureux de vivre, malgré toute chose, des instants de bonheur !

Tonino D'Arcangelo

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